On a diagnostiqué un sarcome synovial, une forme rare de cancer, chez Freya Rowaert (46 ans) alors qu’elle avait à peine 23 ans. Elle a donc vécu la moitié de sa vie avec cette maladie. Il y a quelques années, elle a créé une plateforme en ligne pour les autres…
« La plupart des médecins ne sont en contact avec un sarcome qu’une seule fois dans leur carrière »
11 juillet 2024
Les sarcomes sont des tumeurs qui se développent dans les os ou les tissus mous du corps. En raison de leur rareté, de nombreux soignants ne reconnaissent pas toujours les signaux d'alarme. Le Prof. Dr Gwen Sys (Hôpital Universitaire de Gand) résume les principales caractéristiques pour ses collègues médecins.
Le Prof. Dr Gwen Sys est chirurgien orthopédique oncologue et coordinatrice du Centre de cancérologie de l’Hôpital Universitaire de Gand (UZ Gent). Spécialisée dans les sarcomes, elle est bien placée pour parler de ce groupe de cancers rares.
Prof. Dr Sys, les sarcomes sont encore méconnus de beaucoup de gens. Pouvez-vous nous expliquer brièvement ce qu’est un sarcome ?
« Un sarcome est une tumeur maligne issue du tissu conjonctif. Il peut s’agir de muscles, de graisse, de tendons ou de tissus nerveux, par exemple, mais le cartilage et les os sont également une forme de tissu conjonctif. »
« Les sarcomes sont extrêmement rares. Les sarcomes osseux sont diagnostiqués chez un maximum de 0,5 pour 100.000 personnes par an. Les sarcomes des tissus mous concernent environ 2,5 pour 100.000 personnes. À titre de comparaison : un cancer est rare s’il survient chez moins de 6 personnes sur 100.000 par an. »
Cette très faible incidence explique probablement pourquoi de nombreux soignants ne connaissent pas bien les sarcomes.
« En effet, ainsi que quelques autres facteurs. Les sarcomes osseux, par exemple, sont plus fréquents chez les adolescents, de surcroît souvent au niveau du genou. Par conséquent, ils sont souvent confondus avec des douleurs de croissance, ce qui retarde le diagnostic. »
« La plupart des médecins ne voient un lipome malin qu’une seule fois dans leur carrière »
« Il y a également une confusion en ce qui concerne les sarcomes des tissus mous. Ainsi, une tumeur des tissus mous peut être bénigne ou maligne. Un exemple bien connu est celui du lipome. Dans 1 cas sur 100, il s’agit d’une tumeur maligne, mais dans les 99 autres cas, il s’agit d’un lipome bénin. Il est donc logique qu’en tant que médecin, vous pensiez automatiquement que tout va bien. La plupart des médecins ne voient un lipome malin qu’une seule fois dans leur carrière. »
Comment les médecins peuvent-ils tout de même reconnaître un sarcome à temps ?
« En tant que médecin, vous pouvez être attentif à certains signaux d’alarme. Le Collège d’oncologie a également publié des directives nationales à ce sujet à l’intention des médecins généralistes et des spécialistes. »
« Les signaux pouvant indiquer des sarcomes des tissus mous sont, par exemple, la localisation profonde d’une tumeur, une croissance rapide de la tumeur, des saignements inexpliqués ou des adhérences avec les structures environnantes. Les caractéristiques à prendre en compte pour un sarcome osseux sont, par exemple, une douleur qui dure plus de quelques semaines, une douleur nocturne, une douleur mécanique qui survient sans explication apparente ou un gonflement de l’os. »
« La différence avec les douleurs de croissance, c’est que celles-ci se manifestent souvent dans plusieurs articulations, alors que dans le cas d’une tumeur maligne, la douleur est souvent localisée à un seul endroit. »
De bonnes directives sont une chose. Il faut aussi les transmettre aux soignants sur le terrain, ce qui n’est pas toujours évident. Faut-il davantage de campagnes de sensibilisation sur les sarcomes ?
« La sensibilisation est utile, mais les sarcomes restent extrêmement rares. Le sous-diagnostic pose un problème, mais le surdiagnostic également. Il s’agit de trouver le bon équilibre. »
« Le conseil général que j’aimerais donner à tous ceux qui travaillent dans le domaine de l’imagerie médicale, c’est de ne pas se contenter de faire enlever une tumeur si vous ne savez pas de quoi il s’agit. Dans ce cas, orientez toujours le patient vers une consultation oncologique multidisciplinaire en premier lieu. »
« Si vous ne savez pas exactement de quoi il s’agit, ne vous contentez pas de faire enlever une tumeur, mais orientez d’abord le patient vers une consultation oncologique pluridisciplinaire »
« Ici, à Gand, par exemple, nous discutons chaque semaine avec 20 à 30 patients venant de l’extérieur de notre hôpital. Ce faisant, nous voyons à chaque fois un grand nombre de tumeurs bénignes, ce qui nous permet d’épargner à plusieurs patients des interventions chirurgicales inutiles. »
Pour conclure : organisez-vous certaines actions autour des sarcomes à l’Hôpital Universitaire de Gand (UZ Gent) en juillet ?
« Nous avons délibérément choisi de ne pas le faire cette année. Nous l’avons déjà fait par le passé, mais presque personne n’est venu. Les soignants non plus. »
« C’est logique en soi : il s’agit d’une forme de cancer tellement rare qu’elle ne concerne que très peu de personnes. En outre, en tant que centre individuel, vous consacrez beaucoup de temps et de ressources à ce type d’action, alors qu’avec des actions portant sur d’autres sujets, vous pouvez avoir un impact beaucoup plus important pour un plus grand nombre de patients. »
« Je pense qu’une initiative nationale est une piste plus intéressante. Par exemple, vous organisez un grand symposium sur les cancers rares à l’intention des soignants de première ligne, au cours duquel vous expliquez deux ou trois signaux d’alerte pour chaque type de tumeur. Il s’agit toujours de tumeurs très rares, mais en présentant les informations de manière groupée, elles restent pertinentes pour les soignants. »
Campagne #GetCheckedEarly
Juillet est le Mois de la Sensibilisation aux Sarcomes (Sarcoma Awareness Month). En conséquence, nous partageons avec All.Can Belgium des témoignages de patients et de soignants.
La rareté des sarcomes est l’une des raisons expliquant qu’ils sont souvent diagnostiqués tardivement. Cela peut avoir un impact majeur sur le parcours de soins : plus le délai avant le diagnostic est long, plus le parcours de soins devient souvent difficile pour le patient.
Avec la campagne #GetCheckedEarly, nous voulons sensibiliser à l’importance du dépistage précoce et apprendre aux gens à reconnaître les signes avant-coureurs de trois types de cancers : le sarcome, le cancer du sein et le cancer du testicule.
Plus d’informations sur le site de la campagne www.getcheckedearly.be.
Plus d'articles
« L’app ‘Je Me GèRe’ offre plus d’autonomie aux patients »
Comme le révèle le feed-back recueilli par les Cliniques universitaires Saint-Luc auprès des patients via l’app « Je Me GèRe » (JMGR), la fatigue a probablement l’impact indirect le plus important sur la qualité de vie des personnes atteintes d’un cancer. Nous avons évoqué l’impact de l’app et les nouvelles fonctionnalités de…
Cancer care : the future is now (6 novembre 2024)
Vous êtes curieux de savoir à quoi ressembleront demain les soins contre le cancer en Belgique ? Dans ce cas, notez le 6 novembre 2024 dans votre calendrier. Ce jour-là, nous organiserons la conférence « Cancer care : the future is now » sur la (r)évolution oncologique au 21e siècle,…