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« Nous veillons à ce que chaque patient se sente compris et entouré »
29 mai 2024
Recevoir le diagnostic d’un cancer confronte le patient à 1001 défis : en matière de santé, mais aussi émotionnels, sociaux, professionnels, économiques… En tant qu’infirmière coordinatrice de soins en oncologie, Sylvie Lambin répond aux questions et préoccupations de ses patients dans une optique professionnelle.
Sylvie Lambin est infirmière coordinatrice de soins en oncologie à l’Institut Roi Albert II, le centre des Cliniques universitaires Saint-Luc spécialisé en cancer et hématologie. Depuis 14 ans, elle s’occupe des patients atteints de cancer du poumon à l’hôpital bruxellois. À l’occasion de la Semaine européenne contre le cancer, nous avons évoqué avec elle son travail à l’hôpital.
Quelle est la différence entre un coordinateur oncologique, un infirmier en oncologie (« onconurse ») et un infirmier spécialisé en oncologie ?
Sylvie : « Il s’agit tous de professionnels infirmiers. Les infirmiers en oncologie et les infirmiers spécialisés en oncologie sont au chevet des patients atteints de cancer et assurent les soins infirmiers. En tant que coordinateurs, nous ne donnons plus de soins infirmiers directs. Nous sommes le point de contact du patient, coordonnons l’ensemble de son parcours, assurons l’accompagnement psychosocial nécessaire, améliorons la qualité des soins, etc. »
« Le terme exact pour coordinateur peut d’ailleurs varier. À Saint-Luc, nous parlons de coordinateur de soins en oncologie, tandis qu’à Bordet, ils parlent d’infirmier coordinateur de soins oncologiques (ICSO). Ailleurs, ils utilisent peut-être encore une autre terminologie. »
En tant que coordinatrice, vous ne fournissez plus de soins infirmiers directs. Vous l’avez donc fait auparavant ?
« Absolument, et cette expérience pratique est cruciale. Vous ne pouvez pas accéder directement à un rôle de coordination après vos études en soins infirmiers. Pour devenir coordinateur en oncologie, il faut avoir travaillé au moins 3 à 5 ans en tant qu’infirmière dans un service oncologique. »
« Un coordinateur de soins en oncologie doit avoir au moins 3 à 5 ans d’expérience pratique en tant qu’infirmier(ère) dans un service d’oncologie. »
« De nombreux coordinateurs ont suivi une formation complémentaire en Santé publique (management et politique de santé). Ce n’est pas obligatoire, mais c’est un grand avantage. Personnellement, j’ai aussi obtenu un tel master à l’époque. »
À quoi ressemble une semaine typique pour vous, en tant que coordinatrice ?
« Le cœur de mon travail consiste à être disponible pour les patients et pour l’équipe de soins multidisciplinaire. »
« J’accompagne le patient et ses proches tout au long du trajet de soins. Je le rencontre lors de la consultation d’annonce et je prends ensuite le temps d’évaluer ses besoins, de répondre à ses questions et de mettre en avant les éventuels problèmes psychosociaux pour orienter le patient vers d’autres professionnels de santé, tels que des tabacologues, diététiciens, psychologues, etc. ».
« Je vais à la rencontre des patients en hôpital de jour, durant une éventuelle hospitalisation ou en consultation en ambulatoire, par exemple, lorsque le médecin doit annoncer une mauvaise nouvelle concernant une récidive. »
« Je fais le lien également avec les autres partenaires au sein de la clinique pour faciliter le parcours du patient : planifier des examens, prévenir un médecin aux urgences de l’arrivée d’un de mes patients, échanger des informations auprès des équipes paramédicales et/ou des médecins de l’étage. »
« Mais ce rôle de liaison ne se limite pas à l’hôpital. Les patients peuvent me contacter par téléphone ou par e-mail s’ils ont des questions en lien avec leur traitement et la gestion des effets secondaires. Nous avons d’ailleurs une expertise et une grande autonomie dans le suivi des effets secondaires des chimiothérapies, des immunothérapies ou des thérapies ciblées. »
« Je fais le lien entre le patient et son entourage, l’équipe de soins de Saint-Luc et les soignants impliqués en dehors de l’hôpital. »
« Je fais donc le lien entre le patient et son entourage, l’équipe de soins de Saint-Luc et les soignants impliqués en dehors de l’hôpital, tel que le médecin généraliste, l’équipe médicale et paramédicale d’une maison de repos ou l’infirmière à domicile. »
Quelles autres tâches assumez-vous ?
« Une de mes tâches principales est de préparer la réunion hebdomadaire de Concertation Multidisciplinaire en Oncologie thoracique, d’y assister et d’organiser ensuite le trajet de soins et les différents rendez-vous. »
« Cette réunion avec tous les experts de l’oncologie thoracique est indispensable pour évoquer les projets thérapeutiques de chaque nouveau patient ou lorsqu’un patient a malheureusement une maladie progressive ou une récidive et qu’il est donc nécessaire de proposer une alternative thérapeutique. Nous discutons ainsi chaque semaine de 15 à 25 patients dans notre service. »
« J’ai régulièrement des réunions avec les coordinateurs d’autres services, je peux apporter mon expertise lors de congrès ou de réunions de formations comme la gestion des effets secondaires liés à l’immunothérapie. »
« Aucune de mes journées ne ressemble donc à une autre. »
Selon vous, quelle est la plus grande valeur ajoutée de votre travail pour les patients ?
« Nous sommes un soutien infaillible pour les patients de notre service, à toutes les étapes de leur parcours de soins. Les patients entrent en contact avec de nombreux acteurs différents. Il est donc rassurant pour eux d’avoir une personne de référence. »
« En soutenant chaque patient(e) de manière personnalisée, en fonction de son stress, de ses besoins et de ses attentes, je fais en sorte qu’il ou elle se sente compris(e) et entouré(e). »
Lors de la réunion du groupe de travail sur le cancer du poumon d’All.Can Belgium, en avril 2024, vous avez déclaré que les progrès en matière de traitements personnalisés représentent un défi pour de nombreux coordinateurs oncologiques. Qu’entendez-vous par là ?
« En tant que coordinateur, vous devez rester au fait des nouvelles avancées en matière de traitements et de soins, afin de pouvoir toujours fournir les explications nécessaires à vos patients. Vous devez donc vous former en permanence, en plus de votre travail quotidien. »
« Rester informé de toutes les possibilités thérapeutiques est un challenge pour un coordinateur. »
« Prenez les développements en immunothérapie. Aujourd’hui, l’immunothérapie peut être administrée avant et avec la chimiothérapie, avec la radiothérapie, avant et/ou après une intervention chirurgicale… C’est très positif pour le patient, mais rester informé de toutes les possibilités thérapeutiques est un challenge. »
« Pour les coordinateurs dans les plus petits hôpitaux, c’est souvent encore plus difficile, car ils sont parfois responsables du suivi des patients atteints de différents types de cancer. Ils doivent alors rester à jour sur les dernières avancées thérapeutiques pour tous ces cancers. »
3 priorités pour la politique
Quelles sont les 3 priorités politiques que Sylvie Lambin met en avant pour les soins du cancer du poumon ?
- La prévention du tabagisme est et reste cruciale.
- Élaborer une approche de dépistage du cancer du poumon, basée sur l’étude du KCE (2024).
- Concentrer certaines interventions nécessitant une expertise particulière (comme la chirurgie du cancer du poumon) dans des centres d’expertise.
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